Rêveries poétiques...
La source

Là-bas tout au fond du pré,

Entourée d’une herbe verte,

Une source y est cachée,

Un jour je l’ai découverte.

De terre elle surgit ruisselante,

Joyeusement elle s’ébat,

Saute, pleure ensuite chante

Glousse et rit aux éclats.

Une légende bien lointaine

Circule, et dit que cette eau pure

Guérissait maintes migraines ;

« Un vieux présage des augures ».

Un bain dans son eau claire

Calmait fièvres et douleurs,

Et les femmes désirant plaire

Venaient y jeter quelques fleurs.

Dans le cours de graviers et de pierres,

Existe encore un vieux lavoir,

Dans le temps les lavandières

S’activaient fort sur leur battoir.

Elles étaient là, lavant leurs nippes,

Nos commères, et à grand train

Une lèvre faisant la lippe

Disséquaient tout grain à grain.

Elles médisaient comme à la foire,

Parmi les bulles de savon,

Taillaient bavettes et bavoirs,

Hachant menu chaque maison.

Aujourd’hui c’est la solitude,

La source est à l’abandon,

Le lavoir en décrépitude

Nourrit la mousse et les joncs.

Mais la source est toujours présente,

Son lit est encombré de ronces,

Malgré tout encore elle chante,

L’eau têtue jamais ne renonce.

En écartant quelques racines,

Assis dans l’herbe j’ai écouté,

Et là ! oh surprise divine

Dans un murmure elle m’a parlé.

Elle m’a raconté des histoires

De renardeaux jouant entre eux,

D’oiseaux se disputant pour boire,

Et de papillons merveilleux.

Sur l’être humain, elle est sévère

Et porte un sacré jugement,

Il se complait à faire la guerre,

Se pourrait-il vivre sagement ?

Ah ! si pour les siècles passés

Pour le notre et tous les prochains,

Les hommes avaient su et savaient

Loyalement donner la main.

Ils goûteraient des joies nouvelles

Tout en vivant fiers et debout,

Les difficultés s’amoncellent,

Il leurs faut vaincre les tabous.

Adieu, je cesse mon gazouillage

Et ne parlerai plus jamais,

Sauf, si un jour devenus sages

Les hommes ont appris à aimer.

Depuis, souvent au fond du pré,

Je vais pour ouïr la voix fluette,

Je reste là, jusqu’à véprée,

Mais la source est toujours muette.

Malut Desgraulges